« INESSENTIEL·LE·S »

Le mépris aura donc été décliné sur tous les tons. Voilà la culture et la création clairement exclues pour une période indéterminée de la sphère de la vie sociale. Les lieux de savoir comme les universités, n’ouvriront pas non plus leurs portes dans l’immédiat. Comme les étudiant·e·s et les enseignant·e·s condamné·e·s à tenter de maintenir un semblant d’activités pédagogiques à travers les écrans, artistes et diffuseurs sont sommés d’être numériquement inventifs pour pallier l’expérience sensible, la rencontre physique, l’échange collectif. Les commerces restent donc ouverts. On peut continuer de s’y contaminer, pour que les lieux d’art, de culture ou d’échanges de savoirs puissent rester fermés plus durablement. 


On continuera de plaindre les citoyen·ne·s en mal de divertissement en occultant, ce faisant, la situation désespérée des artistes qui était déjà problématique avant la crise sanitaire. La culture et la création ne sont pas des divertissements mais des possibilités de vie, or celles-ci sont aujourd’hui directement menacées, en dépit du soutien massif du public, apporté, entre les deux confinements, à nos lieux, nos événements, nos propositions artistiques, preuve, s’il en était besoin, de l’attachement des français·e·s à l’art.


Plus de 80% d’entre nous vivent en dessous du seuil de pauvreté. Nous ne bénéficions d’aucun statut. Nous devons parfois cumuler plusieurs activités pour approcher le niveau des minimas sociaux. Beaucoup parmi nous sont au RSA, ASS, minimum vieillesse… Les plus jeunes d’entre nous, après leurs études, ne bénéficient d’aucune aide. Une partie de cette activité se fait en tant qu’auto-entrepreneurs parce que les structures qui nous emploient refusent de nous salarier, même sur de petites durées. Tout est fait pour dissuader d’aller dans cette voie, tant elle est jalonnée de difficultés. 
La Covid 19 aura anéanti, en ce qui nous concerne, une année de projets, conduisant à l’annulation d’expositions, de ventes, d’interventions, de missions. Ce qui est perdu l’est définitivement. Les aides spécifiques proposées sont dérisoires et ne bénéficient qu’à 2% d’entre nous. Il n’y a, par ailleurs, toujours pas d’assurance chômage pour les artistes-auteur·e·s. Face à notre précarisation, assortie du mépris que nous vaut le fait d’être considéré·e·s comme « inessentiel·le·s », nous appelons à une mobilisation contre toutes les précarités, pas seulement celle qui nous touche directement. Nous souhaitons aussi affirmer haut et fort notre légitimité en tant qu’artistes et citoyen·ne·s, créateurs de valeurs. Faisons place à l’art, à la créativité, à l’invention sociale, aux valeurs de solidarité, d’entraide, d’ouverture au coeur de la cité, car il faudra bien compter avec nous, les artistes, pour trouver des solutions aux blocages actuels.

ART EN GRÈVE OCCITANIE,
le 15 Décembre 2020.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Fièrement propulsé par WordPress | Thème : Baskerville 2 par Anders Noren.

Retour en haut ↑